Pendant la saison pluvieuse, au Burkina comme dans tout autre pays tropical, les moustiques pullulent un peu partout. Surtout dans les zones où l’eau stagne, où il y a des immondices. Et c’est pendant cette même période, que bon nombre de personnes contractent le paludisme. En 2016, au Burkina, l’on a enregistré 40 000 décès dont 3 000 enfants. Que faire pour éviter cette maladie ? Des éléments de réponse avec Vincent Nikièma, médecin généraliste et promoteur de la clinique les opportunités.
Lefaso.net : Pouvez-vous nous dire ce que c’est que le paludisme ?
Vincent Nikièma : Le paludisme est une infection due à un parasite appelé plasmodium. Une fois infecté, l’organisme va réagir à travers un certain nombre de signes dont le chef de file est la fièvre. Celle–ci peut s’accompagner d’autres symptômes comme les vomissements, les céphalées, les courbatures. Il est vrai que ces signes ne sont pas spécifiques au paludisme puisqu’on peut les retrouver dans d’autres maladies. C’est l’examen sanguin comme « la goutte épaisse » qui va confirmer la présence du plasmodium dans l’organisme. La goutte épaisse peut être négative alors que le patient présente des signes du palu, dans ce cas précis, que faire ? Comme son nom l’indique, c’est une goutte de sang que l’on analyse sur une quantité moyenne de cinq litres chez l’adulte par exemple. On peut effectivement faire le test et ne rien voir alors que le patient fait le paludisme surtout si la densité est très faible. Souvent, cela peut être lié à la personne elle-même, il y a des personnes qui sont très sensibles. Même à des taux très faibles voire insignifiants, ils vont commencer à développer les signes, cela arrive quand cette dernière est très fatiguée. Cela peut jouer sur l’immunité et cette dernière devient faible et donc plus vulnérable face à la maladie. Quand la goutte épaisse est négative, on fait d’autres examens pour voir s’il n’y a pas d’autres maladies. Mais si on arrive à conclure qu’il n’y a pas une autre maladie, le médecin peut être amené à donner un traitement contre le paludisme surtout si on est en période de haute transmission du paludisme.
Quelles sont les causes de cette maladie ?
Cette maladie est due à un parasite qu’on appelle plasmodium. Le plasmodium est introduit dans l’organisme par un moustique appelé anophèle. L’anophèle femelle lors de son repas sanguin va assurer la transmission d’un individu à un autre.
Comment se manifeste le paludisme ?
Il y a deux formes de paludisme : le paludisme simple qui se manifeste par des signes classiques que sont les céphalées, les vomissements, fièvre… et le paludisme grave qui, en plus des signes du paludisme simple, associe un des signes de gravité comme les convulsions, les troubles de la conscience, les hémorragies, une pâleur très intense qui est signe d’anémie grave, … La distinction est bonne à savoir car la prise en charge est différente en fonction de la forme.
Quel conseil avez-vous à donner à l’ensemble de la population pour prévenir cette maladie ?
Il faut surtout encourager la population à consulter tôt. C’est le retard de consultations qui fait qu’on a un fort taux de décès. Le paludisme dépasse même un problème de santé publique, pour devenir un problème de développement, d’où la nécessité de la prévention. La prévention se situe à plusieurs niveaux : Au niveau individuel et au niveau collectif. – Au niveau individuel, c’est d’encourager les gens à dormir sous des moustiquaires imprégnées. Au-delà même de la moustiquaire, on peut utiliser les répulsifs, c’est-à-dire des crèmes anti- moustiques, pulvériser la maison avec des insecticides, etc.- Au plan collectif, la pulvérisation à grande échelle, l’assainissement général et au niveau des domiciles doivent être promus ; il faut détruire les endroits où l’eau peut stagner afin d’éviter la multiplication des moustiques.
Quelles sont les statistiques au Burkina ?
Dans les pays tropicaux et en Afrique sub-Saharienne où le paludisme sévit, il cause des millions de morts chaque année, les plus concernés sont les enfants de moins de cinq ans. Au Burkina Faso, les statistiques actuelles stipulent que plus de la moitié des hospitalisations et des motifs de consultations sont attribués au paludisme ainsi qu’un tiers des décès. La moitié de tous ces cas reviennent aux enfants de moins de cinq ans.
Docteur, dites-nous, où en est-on avec les recherches sur le vaccin contre le paludisme ?
Les recherches sont avancées même si pour le moment, il n’y a pas de vaccin. Il y a même une recherche qui est très avancée dont l’expérimentation se fait au Burkina dans le centre de recherche de Nanoro. Toutes les étapes de la recherche ont été pratiquement franchies. Ils sont actuellement dans les derniers essais. Sans vous donner de date précise, il pourrait incessamment être disponible. Il faut signaler que les recherches au plan national ne sont pas uniquement focalisées sur le vaccin mais aussi dans les centres de santé, sur les médicaments et sur la maladie elle-même. Cela permet de suivre le comportement du plasmodium face aux médicaments. C’est ainsi qu’on est arrivé à retirer la chloroquine à cause des résistances constatées.
Quelle est la différence entre le paludisme et la dengue ?
Avant d’aborder la question je tiens à préciser que l’appellation « palu-dengue » très répandue actuellement n’est pas appropriée car ce sont deux maladies différentes et distinctes. Tout d’abord, le paludisme est causé par un parasite alors que la dengue est causée par un virus. Ensuite, c’est vrai que les deux ont pour vecteur responsable le moustique mais ce n’est pas la même espèce. Pour le paludisme c’est l’anophèle qui est responsable alors que pour la dengue c’est l’aedes qui pique généralement dans la journée contrairement à l’anophèle. Les symptômes des deux maladies se ressemblent à quelques différences près. Le traitement de la dengue est symptomatique.
Comment s’y prendre ?
Il n’y a pas de traitement étiologique pour la dengue, il faut surtout mettre l’accent sur la prévention qui se résume aux moyens individuels et collectifs de protection contre les piqures de moustiques ainsi que l’assainissement de notre milieu de vie pour empêcher la multiplication des moustiques. Le plus souvent le traitement symptomatique bien conduit peut assurer la guérison. La dengue peut entraîner des complications très graves nécessitant une prise en charge assez lourde, d’où la nécessité de consulter très tôt.
Rita Bancé/Ouédraogo
lefaso.net
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mercredi 18 juin 2017